Berenice Abbott

Berenice Abbott introduction

Berenice Abbott est née dans l’Ohio à la fin du XIXème siècle. Nous dirions aujourd’hui qu’elle fut « influenceuse» : elle a contribué à promouvoir les œuvres d’Eugène Atget et de Lewis Hine. Photographe, elle est connue pour ses portraits, pendant sa période parisienne. Ensuite, elle s’illustrera avec ses photographies urbaines et architecturales du New York des années 1930. Enfin, elle réalisera des photos scientifiques. Artiste en marge des courants et des modes, Berenice Abbott a gagné la reconnaissance au crépuscule de sa vie.

Berenice Abbott, la jeunesse

Berenice est née le 17 juillet 1898 à Springfield dans l’Ohio. Elle a vécu une enfance difficile dans une famille déchirée, qu’elle a quittée dès ses 19 ans.

Elle fera des études de journalisme à l’université de l’Ohio puis aux Beaux-Arts de New-York. Fréquentant les milieux artistiques et intellectuels new-yorkais, elle rencontre Man Ray et Marcel Duchamp.

Aux Beaux-arts, elle étudie la peinture et la sculpture. En 1921, elle rejoint Paris ou elle travaille dans l’atelier d’Antoine Bourdelle, puis chez Constantin Bracusi. Ensuite, elle ira à Berlin où elle étudiera à la Kunstschule. Elle ne connaîtra pas de succès dans ces matières artistiques et acceptera, de retour à Paris d’être l’assistante de Man Ray.

Paris – Studio

Berenice Abbott, assistante de Man Ray, est à la fois son modèle (elle pose nue pour lui) et sa collaboratrice. Il lui apprend le tirage, puis la prise de vue, elle est particulièrement douée pour le tirage en laboratoire. Puis ses portraits connaissent un certain succès et lui apportent ses premiers revenus « concrets »

En 1926, elle prend son autonomie et ouvre son propre atelier, 44, rue du bac. Elle connaît rapidement la réussite : André Gide, Jean Cocteau, James Joyce, la princesse Murat, Marie Laurencin, André Maurois, Pierre de Massot, Sylvia Beach, Janet Flanner sont ses clients.

Pendant cette période « parisienne » Abbott collabore également avec le magazine « Vu »

Dans cette série de 9 portraits on notera le style épuré de la mise en scène qui contraste avec les décors opulents chers à certains photographes.

Paris, Eugène Atget

Berenice Abbott rencontre Atget en 1925. Il a alors 70 ans et n ‘est pas en bonne santé. Fascinée par la modernité de ses travaux, elle lui achète quelques tirages. Berenice fera son portait en 1927. Eugène Atget ne verra jamais cette ultime photographie où il apparaît très affaibli. Il est mort très peu de temps après la prise de vue. Abbott ayant à cette période une situation financière confortable, en profite pour acheter toutes les archives d’Eugène Atget, jusqu’alors négligées. Elle ne cessera de promouvoir son œuvre en écrivant des livres et en organisant des expositions.

Pour en savoir plus sur ce photographe parisien, mon article : Eugène Atget

Berenice Abbott portrait de E.Atget

Berenice Abbott, Changing New-York

C’est en 1929 que Berenice revient à New-York avec dans ses bagages les archives d’Eugène Atget. Elles seront exposées à la galerie de Julien Lévy.

Après 8 ans d’absence, les changements architecturaux de New-York, les contrastes entre la ville ancienne et les buildings modernes surprennent Berenice Abbott. Peut-être influencée par l’œuvre d’Atget, elle décide d’entreprendre un grand projet : photographier New-York pour conserver la mémoire de son temps.

La vie n’est pas facile pour Berenice à New-York : sa renommée parisienne ne l’a pas suivie. La concurrence est rude et son style réaliste, précis, sans compromis n’est pas dans l’air du temps. Le pictorialisme, dont Alfred Stieglitz est le porte-drapeau, est à son apogée. La grande dépression du début des années 1930 empire la situation financière de Berenice Abbott.

Elle finira par obtenir un poste d’enseignante de photographie en 1935 qui lui assurera un revenu fixe.

Son projet Changing New-York n’aboutira qu’en 1937 par une exposition au musée de la ville de New-York. Une publication dans le magazine Life suivra, ainsi qu’un livre, en 1939.

Encouragée par cette notoriété, Abbott continuera de promouvoir l’œuvre d’Eugène Atget ainsi que celle de Lewis Hine. C’est à cette époque qu’elle a rencontré ce photographe américain dédaigné par le microcosme new-yorkais. 

Berenice Abbott, photographe scientifique

Dès le début des années 1940, Abbott proposera des reportages de photographie scientifique. Elle veut faire découvrir la science à ses contemporains. Il lui faudra attendre près de 20 ans pour obtenir une collaboration avec le Massachusetts Institute ot Technology et réaliser ce projet. En pleine guerre froide, les États-Unis ont compris qu’il fallait encourager la recherche scientifique.

Au début des années 1960, Berenice Abbott va quitter New-York pour s’installer dans le Maine. Elle pratique moins la photographie, pourtant elle produit une série de photos prises le long de la route n°1, le long de la côte Est.

Pendant cette période, elle se consacre à l’écriture. The world of Atget est publié en 1964, suivi de livres documentaires techniques. Comme ses modèles, Eugène Atget et Lewis Hine, elle connaîtra une « traversée du désert »  et tombera dans l’anonymat.

C’est dans les années 1970 que la reconnaissance viendra. Elle obtiendra de nombreux prix et récompenses.

Berenice Abbott s’est éteinte le 9 décembre 1991 à Monson dans le Maine

La personnalité de Berenice Abbott, photographe

Comme nous l’avons vu, Abbott était en marge des modes de son époque. Femme indépendante, ce qui n’était pas courant au début du XXème siècle, elle représente avec Lisette Model les femmes fondatrices de la New-York Photo League. Cette organisation, fondée en 1936, rassemble des photographes documentaires.

Au fil des biographies, nous voyons que de nombreux photographes de la fin du XIXème, début du XXème siècle ont fait leurs premières armes dans la peinture. Nous le constatons dans les sujets : natures mortes, portraits dans des décors élaborés et dans les tirages. Le post-traitement des photos en laboratoire permettait de personnaliser les œuvres.

Quand Berenice est revenue à New-York en 1929, la mode était encore au pictorialisme, courant emmené par Alfred Stieglitz

Berenice Abbott, conception photographique

La conception de Berenice Abbott est différente. Elle se veut documentaire, rigoureuse, précise. Pour elle la photographie ne doit pas imiter la peinture par ses compositions et ses manipulations, elle doit être témoin de l’instant. Elle dira à la sortie de Changing New-york

« Le rythme de la ville n’est ni celui de l’éternité ni celui du temps qui passe mais de l’instant qui disparaît.

C’est ce qui confère à son enregistrement une valeur documentaire autant qu’artistique. »

Berenice Abbott

C’est bien sûr, ce caractère authentique que Berenice a apprécié dans les œuvres d’Atget et de Hine. Le passé n’est pas nostalgique : fixé par la photographie, il est à sa place.

La bibliographie de Berenice Abbott

De nombreux livres ont été écrits par Abbott, et à son sujet. Je vous propose un prochain article pour en faire une synthèse : La bibliographie de Berenice Abbott

Conclusion

Nous perpétuerons au fil des décennies ce débat entre la photographie documentaire, précise, rigoureuse et la photographie mise en scène, retouchée, manipulée. Nous venons de voir que cette dualité existait à l’époque de Berenice Abbott entre les adeptes du pictorialisme et ceux de la photographie directe ( Straight Photography). Au siècle du numérique, le choix des prises de vue en mode RAW impose le post-traitement. Par conséquent, l’opérateur met sa touche finale au grand dam de certains qui décrient la « photo retouchée ».

Concevons que la photographie de reportage soit rigoureuse, exacte. Elle est un témoignage et se doit authentique. Concevons que certains prennent des vues pour garder l’instant T en mémoire, et qu’ils ne voient pas la nécessité de retoucher leurs prises de vue. Mais  acceptons que d’autres puissent retravailler leurs photos pour leur donner l’aspect qu’ils souhaitent.

Je ne le dirai jamais assez la bonne photographie est celle que nous voulons faire (prendre et post-traiter)

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

Hippolyte Bayard, pionnier de la photographie

Hippolyte Bayard, introduction

Hippolyte Bayard est un nom que l’on rencontre fréquemment quand on fait des recherches sur la photographie. Il est l’un des précurseurs du média avec Niepce, Daguerre et Fox-Talbot.

Son apport en tant qu’inventeur ne sera pas vraiment reconnu : le daguerréotype de Daguerre l’a précédé de quelques semaines.

Ses contributions nombreuses et originales en tant que photographe (ouverture d’atelier, mission héliographique, combinaison de négatifs), en font un véritable trait d’union entre l’invention et la pratique. Dans cet article, je vous propose de faire connaissance avec ce grand nom de la photographie.

Hippolyte Bayard, inventeur

Bayard est né en 1801 à Breteuil-sur-Noye, dans l’Oise. Il démarre sa carrière professionnelle en tant que clerc de notaire. En 1825 il rejoint la région parisienne. Il entre au ministère des finances où il aura un statut modeste.

Son attirance pour les milieux artistiques lui permet d’être informé des recherches héliographiques de Niepce et Daguerre. Il réalise lui-même des essais qu’il note soigneusement dans ses cahiers.

Dès 1839, il réalise des reproductions sur papier. En juillet, il les expose à une fête de charité organisée au profit des victimes du tremblement de terre de la Martinique. Il présente au public 30 photos de natures mortes et d’architecture. Son procédé est révolutionnaire mais c’est Daguerre, plus influent, qui aura les faveurs officielles.

Les tirages sur papier

Le procédé sur papier de Bayard et Talbot est innovant. Il offre la possibilité, à partir du négatif, d’obtenir autant d’épreuves positives que l’on souhaite. Et puis, le calotype, plus sensible à la lumière que le daguerréotype, permet de faire des images plus rapidement.

L'exposition, lumière

Hippolyte Bayard, La noyade

Bayard est amer. Pour son invention, le gouvernement lui a versé 600 francs alors que Daguerre recevra une rente annuelle de 10 000 francs.

En 1840, il met en scène sa propre mort par noyade pour protester contre cette injustice. Cette image morbide constituera la première mise en scène photographique. Au dos de la photo, Bayard a écrit ce texte :

« Le cadavre du Monsieur que vous voyez ci-derrière est celui de M. Bayard, inventeur du procédé dont vous venez de voir ou dont vous allez voir les merveilleux résultats. À ma connaissance, il y a à peu près trois ans que cet ingénieux et infatigable chercheur s’occupait de perfectionner son invention.
L’Académie, le Roi et tous ceux qui ont vu ces dessins que lui trouvait imparfaits les ont admirés comme vous les admirez en ce moment. Cela lui fait beaucoup d’honneur et ne lui a pas valu un liard. Le gouvernement qui avait beaucoup trop donné à M. Daguerre a dit ne rien pouvoir faire pour M. Bayard et le malheureux s’est noyé. Oh ! instabilité des choses humaines ! Les artistes, les savants, les journaux se sont occupés de lui depuis longtemps et aujourd’hui qu’il y a plusieurs jours qu’il est exposé à la morgue personne ne l’a encore reconnu ni réclamé. Messieurs et Dames, passons à d’autres, de crainte que votre odorat ne soit affecté, car la figure du Monsieur et ses mains commencent à pourrir comme vous pouvez le remarquer. »

Hippolyte Bayard, la noyade

Hippolyte Bayard, photographe

Hippolyte Bayard les moulins de la tour

Ouvrage d’Anne de Mondenard, édité en 2002 aux éditions de patrimoine : « La mission héliographique – Cinq photographes parcourent le France en 1851″

Malgré les difficultés qu’il a connues au niveau de la reconnaissance de son invention, Bayard aura une véritable carrière de photographe, tout en restant employé au ministère des finances.

Il emploiera le plus souvent le procédé du calotype inventé par William Henri Fox-Talbot, qui et proche de sa propre invention. Bayard présente ses photographies dans les expositions universelles. Il recevra une médaille d’argent en 1849.

Combinaison de deux négatifs

Bayard a mis au point un procédé qui consiste à combiner deux négatifs, un pour le ciel, l’autre pour le paysage. Cette superposition permet d’avoir les deux parties de l’image avec des expositions différentes. Gustave Le Gray utilisera également cette méthode pour ses marines.

La mission héliographique

En 1851, Hippolyte Bayard est membre fondateur de la mission héliographique. Qui deviendra la Société Française de Photographie en 1854.

Il fait partie des 5 photographes mandatés par les monuments historiques, sous la direction de Prosper Mérimée, pour faire un état des lieux du patrimoine architectural français. Pour cette mission, il utilise le calotype, il opère en Normandie. Contrairement aux autres photographes, aucune de ses photographies n’a été retrouvée.

Fin de carrière, reconnaissance

Hippolyte Bayard reste employé au ministère des finances jusqu’à sa retraite, en 1863.

Entre temps, il ouvre un atelier rue de la Madeleine à Paris, associé avec Bertall (de son vrai nom : Charles Constant Albert Nicolas d’Arnoux de Limoges Saint-Saëns. On comprend pourquoi il l’a abrégé !). Ils exerceront de 1860 à 1866, puis Bertall continuera seul.

La Société Française de Photographie conserve de nombreuses photographies de Bayard (Quartier des Batignolles à Paris, natures mortes, jardins, autoportraits et également sa ville natale de Breteuil-sur-Noye…)

Si en France, on ne promeut pas l’œuvre d’Hippolyte Bayard, il est toutefois Chevalier de la Légion d’honneur. Dans sa ville natale, l’école primaire porte son nom.

Paradoxalement, il est plus reconnu aux États-Unis, en Amérique du Sud ou au Japon.

Hippolyte Bayard s’est éteint à Nemours le 14 mai 1887.

Hippolyte Bayard, jardins

Conclusion

Voici l’histoire du quatrième inventeur de la photographie. Vous pouvez relire les articles consacrés aux autres pionniers dans la rubrique : Les grands noms de la photographie

La paternité de l’invention est disputée. Pour moi, chacun de ces quatre hommes a apporté une pierre angulaire à l’édifice.

Pour en savoir plus sur Hippolyte Bayard, voici un ouvrage en français de 144 pages écrit par un collectif. Michel Poivert a rédigé l’introduction.

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

Lisette Model

Lisette Model, portrait

Lisette Model, photographe américaine d’origine autrichienne va marquer de son empreinte le médium. Elle initiera, avec Berenice Abott entre autres, le premier mouvement féminin de la photographie américaine.

Lisette, naissance à Vienne

C’est sous le nom d’Élise Amélie Felicie Stern, que la future photographe Lisette Model a vu le jour, à Vienne, le 10 novembre 1901.

Son père d’origine italienne, est médecin, d’abord dans l’armée autrichienne puis à la Croix-Rouge. Sa mère est française et catholique. Lisette sera baptisée dans ce rite, bien que son père soit juif. D’ailleurs, devant la montée de l’antisémitisme (déjà !) la famille abandonnera le nom de Stern pour celui de Seybert en 1903.

La première vocation de Lisette Seybert sera la musique et le chant. Elle étudiera le piano avec le compositeur Arnold Schönberg, professeur qui a eu une grande influence dans sa vie. À la mort de son père, en 1924, elle quittera Vienne pour Paris.

Lisette à Paris

À Paris, Lisette va étudier le chant avec la soprano polonaise Maria Freund. Elle rencontre son futur mari, peintre français d’origine russe Evsa Model

Lisette Model et la photographie

À partir de 1933, Lisette abandonnera la musique pour se consacrer à l’étude des arts visuels. Elle suivra d’abord les cours de peinture d’André Lhote, puis sous l’influence de sa sœur, Olga Seybert, photographe professionnelle, elle s’intéressera à ce médium.

Lisette sera d’abord formée par Rogi André (épouse d’André Kertész) Dès 1934, le style Lisette Model prendra forme. Elle réalisera une série de photographies sur la promenade des anglais à Nice, lors d’une visite à sa mère, qui réside sur la Côte d’Azur. Ce sont des portraits de rue, bien cadrés, souvent captés clandestinement. Ils montrent la bourgeoisie sans concession, dans des attitudes peu flatteuses. Ils sont une rupture avec les poses longues des photographies du XIXème et début du XXème siècle.

Lisette Model Nice Riviera

À partir de 1937, c’est Florence Henri, peintre et photographe qui sera son mentor.

Les magazines Lilliput et Regards publieront les photographies de rue de Lisette.

En 1937, elle se marie avec Evsa. Devant la montée du nazisme, ils quitteront la France pour New-York en 1938.

Lisette Model aux États-Unis

Lisette et Evsa vont fréquenter le milieu de l’avant-garde new-yorkaise. Ils rencontreront Alexey Broovitch, qui permettra à Lisette de publier régulièrement ses photos dans Harper’s Bazaar.

Les années 1940

Lisette Model adhère à la New-York Photo League,  et côtoiera  Ralph Steiner, Berenice Abbott, Beaumont Newhall,  et Ansel Adams.

Ralph Steiner est éditorialiste au magazine PM’S Weekly. Les photos de Lisette prises en France y seront publiées, et elle est engagée comme photographe.

Le Muséum of Modern Art de New-York achètera des photos de Lisette qui seront exposées auprès de celles de Bill Brandt ou Harry Callahan.

Lisette Model Baigneuse

Ses œuvres intègrent le style de l’école de New-York partagée entre deux tendances contradictoires : le documentaire social de la Photo League et le style journalistique sophistiqué de certains magazines. Lisette Model sera à la fois reconnue par ses confrères et par les directeurs de magazine. Invitée sur la côte ouest des États-Unis, elle réalisera de nombreux portraits de célébrités.

Lisette Model enseignante

Après un passage à la California School of Fine Arts de San Francisco en 1949, 1950, Lisette Model sera professeur à la New School for Social Research de New York. Elle y enseigne la photographie de même que son amie Berenice Abott. Elle aura comme élève célèbre Diane Arbus en 1957, Larry Fink et Eva Rubinstein, fille du pianiste Arthur dans les années 1960.

Lisette Model enseignera jusqu’à sa mort qui surviendra le 30 mars 1983 à New York.

L’œuvre de Lisette Model  

Le style de Lisette Model est dynamique, moderne, réaliste. Il contraste avec les photographies du XIXème et début du XXème siècle et les techniques qui imposaient des poses longues. Lisette privilégie des cadrages serrés, les contrastes exagérés, l’utilisation récurrente du flash. Elle a parfois recours à la contre-plongée.

Les thèmes sont des documentaires sociaux. Elle produira des séries avec des photos de rue prises à Nice ou à Paris pendant sa période française. Aux États-Unis se sera Wall Street, Lower East Side, Coney Island ou l’Opéra de San Francisco.

C’est une photographe ironique, irrévérencieuse, capable de capturer dans ses clichés les aspects les plus grotesques de la société américaine d’après-guerre.

Lisette model Little Man

La série Reflections (1939 à 1945) montre les reflets des passants et des immeubles dans les vitrines. Les séries Running legs, jeux de jambes (1940 – 1941) et Pedestrians, sont des portraits de personnages anonymes extraits de la foule, (1945). Lisette réalise sa série Jazz en 1952.

Parmi les personnages célèbres dont Lisette a réalisé des portraits on retiendra Frank Sinatra, Georges Simenon, Ella Fitzgerald, Louis Armstrong

Exposition

Je vous rappelle l’exposition organisée par le Musée de la photographie de Charleroi jusqu’au 22 janvier 2023. Tous les détails dans mon article Expositions photographie automne 2022

Bibliographie

Voici trois ouvrages disponibles, consacré à Lisette Model. D’abord une réédition du premier livre écrit sur elle. Sam Stourdzé et Ann Thomas ont écrit le deuxième. Le troisième est l’œuvre de Monica Poggi

Lisette Model

Ouvrage réédité à l’occasion du 25ème anniversaire de la mort de Lisette Model. La première édition datant de 1979. Chronologie et biographie mises à jour. Design original de Marvin Israel

Textes en anglais – Éditeur : Aperture – 109 pages – Format : 31 x 39 cm – Relié

Lisette Model

Auteurs : Sam Stourdzé et Ann Thomas

Textes en anglais – Éditeur: Leo Scheer en 2002 – 187 pages – broché – Format 22 x 28 cm

Grande Mostra Lisette Model

Auteur : Monica Poggi

Publié à l’occasion de la première exposition italienne consacrée à Lisette. Ce livre retrace son œuvre.

Texte en anglais et en italien – Éditeur: Silvana en 2021 – 128 pages – broché.

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

William Klein

William Klein est décédé le 10 septembre dernier à Paris. Il était peintre, graphiste, photographe et cinéaste. À l’instar de Robert Frank, il s’affranchira des canons traditionnels de la photographie pour faire entrer le médium dans l’art contemporain. Il fut l’auteur de nombreux ouvrages, consacrés en particulier aux grandes métropoles : New-York, Paris, Rome, Moscou, Tokyo…

Il est rare de commencer une biographie par l’annonce du décès. Cet évènement passé presque inaperçu m’invite à écrire cet article. Ce mois de septembre a été marqué par le décès de la reine Elisabeth, deux jours avant celui de William Klein. Ils étaient nés à deux jours d’intervalle, en avril 1926.

Prononcez William Klein (klèïn) comme dans Enstein  

William Klein Portrait

Enfance à New-York

William Klein est né le 19 avril 1926 à New York, où il a grandi et étudié. Il est le fils d’immigrés juifs hongrois. La fabrique de vêtements et les finances de son père s’effondreront dans la crise des années 1930.

Vivant dans un quartier populaire, William souffrira de l’antisémitisme ambiant. Il va trouver refuge dans l’art et les sciences humaines. Dès l’âge de 12 ans, le musée d’art moderne de New-York (Moma), deviendra sa deuxième maison. Il fréquente aussi les salles de cinéma, pour voir les films de Fritz Lang et de Sergueï Eisenstein.

William entre au City College de New-York à 14 ans. Il étudie la sociologie et obtient son diplôme en 1944.

William Klein et la France

Engagé dans l’armée américaine, W.Klein servira en France et en Allemagne, comme opérateur radio. Après sa démobilisation, il choisira de revenir en France dès 1948. Il étudie à la Sorbonne l’histoire de l’art. Il va rencontrer le peintre André Lhote et le cubiste Fernand Léger qui va l’influencer pour bousculer les codes de l’art « bourgeois ». Léger pousse ses élèves à sortir des ateliers pour peindre dans la rue. Plus tard Klein fera sortir des studios ses mannequins pour prendre des photos de mode dans la rue, également.

Rencontre avec Jeanne Florin

Dès son arrivée en France, William Klein va rencontrer celle qu’il considère comme « la plus belle femme qu’il ait jamais vu de sa vie ». Jeanne Florin est un mannequin belge. Ils se sont mariés en 1950. Ils auront un fils, Pierre en 1963 et resteront unis jusqu’à la disparition de Jeanne en 2005.

William Klein en Italie

Influencé par Mondrian et le Bauhaus, William Klein réalise des peintures murales abstraites. L’architecte Angelo Manglarotti remarque ses œuvres et l’invite en Italie.

Au début des années 1950, William réalise dans ce pays de nombreuses peintures murales à la demande de Manglarotti et d’autres architectes. Il collabore en même temps avec le magazine d’architecture italien Domus pour des illustrations obtenues à partir de photographies de ses fresques.

En 1951, il expose au théâtre Piccolo de Milan. Puis en 1952 et en 1953, à la galerie Del Milione, toujours à Milan. Ses images sont floues, très contrastées, avec de grands angles. Le grain du film est grossier. Sa rupture avec les canons traditionnels de la photographie l’ont fait surnommer « l’anti-photographe ».

William Klein expérimente également la juxtaposition de la peinture abstraite et de la photographie.

William Klein, Mohamed Ali
Mohamed Ali, juxtaposition de peinture

William Klein et Vogue

Comme nous le voyons, Klein est un artiste multidisciplinaire, il va s’intéresser également à l’art cinétique. Lors d’une de ses expositions à Paris, Alexander Liberman, rédacteur en chef du magazine Vogue apprécie son travail.

C’est en 1954 que Klein retourne aux États-Unis pour rencontrer Liberman  Débutera sa collaboration avec le magazine Vogue. Il sera engagé comme photographe de mode et recevra des financements pour créer un journal photographique ayant pour objet la ville de New-York.

Le traitement anticonformiste des images, le choix des sujets montrant New-York sous un angle peu flatteur lui vaudront l’hostilité des critiques. « Life Is Good and Good for You in New York » est très mal accueilli. Klein rassemblera alors ses images dans un livre « New-York 1954-55 ». Aucun éditeur américain n’acceptera de le publier. C’est à Paris d’abord qu’il sera édité par le Seuil en 1956. Puis il paraitra en Italie la même année.

Klein va collaborer avec le magazine Vogue jusqu’en 1965, comme photographe de mode. Il bousculera également les habitudes de cette discipline. Les mannequins vont sortir des studios et  les attitudes seront différentes. Finies les démarches de danseuses classiques et les mains définitivement fixées sur les hanches.

Vogue photo de mode

William Klein et le cinéma

Le réalisateur Federico Fellini est à son tour séduit par le travail de Klein sur New York. Il va l’engager comme assistant pour le film « Les Nuits de Cabiria« . William profitera de son séjour à Rome pour publier un ouvrage sur cette ville en 1960.

Rome la nuit
Rome la nuit

En 1965, il abandonne la photographie jusqu’aux années 1980 pour se consacrer au cinéma. Il a réalisé plusieurs documentaires:

  • Broadway by light en 1958, qui sera un des premiers films « Pop »,
  • Who are you Polly Maggoo ? en 1966, satire cruelle sur l’univers de la mode,
  • Mr. Freedom en 1969,
  • Eldridge Cleaver.en 1970,
  • Muhammad Ali the greatest en 1974,
  • The Little Richard story en1979,
  • The Messiah en 1999.

Film de William Klein : qui êtes-vous Polly Magoo

En outre, il a produit plusieurs films pour la télévision française dans les années 1960, et plus de 250 publicités (pour, entre autres, Citroën, Dim, Saupiquet, Renault, Ricqlès…).

Dans les années 1980, il a retrouvé son intérêt pour la photographie. Dans cette période, il utilise de grands angles et des gros plans.

Il publiera plusieurs ouvrages :  Close up en 1989, Torino « 90 » en 1990, In & Out of Fashion en 1994, Paris + Klein en 2000.

C’est Klein qui a illustré la pochette de l’album de Serge Gainsbourg, « Love on the beat » en 1984.

Pochette disque love on the beat
Pochette de l’album « Love on the beat »

Reconnaissance

Le travail de William Klein est reconnu internationalement et il a été récompensé par divers prix.

  • Malgré un accueil mitigé pour ses premiers travaux, il obtient le prix Nadar en 1957,
  • Le prix Jean Vigo en 1988,
  • La société allemande de photographie lui décerne le prix de la culture en 1988,
  • Le prix international de la Fondation Hasselblad en 1990,
  • Médaille du centenaire de la Royal Photographic Society en 1999,
  • Le Lucy Award en 2005, pour l’œuvre de toute une vie,
  • En 2005 toujours, il reçoit le prix Photo España
  • L’Université de Liège le nomme Docteur Honoris Causa en 2010,
  • Il est lauréat de l’ Art Masters à Saint Moritz en 2011
  • Prix pour sa contribution remarquable à la photographie aux Sony World Photography Awards

De nombreuses expositions et rétrospectives ont été organisées dans le monde entier pour présenter ses travaux photographiques et cinématographiques. La dernière intitulée  William Klein : « Yes » à l’International Center of Photography de New York, s’est achevée ce 15 septembre, quelques jours après son décès.

Bibliographie

Je consacrerai prochainement un article spécifique à la Bibliographie de William Klein qui étoffera la librairie de Photo-passions. À bientôt donc.

Vous pouvez laisser un commentaire dans le cadre ci-dessous, vous abonner à notre bulletin d’informations ou nous suivre sur les réseaux sociaux (liens dans le cadre suivant).

Les boutons carrés (en bas de l’écran) permettent de partager l’article dans les réseaux sociaux.

Charles Nègre

Charles Nègre était un artiste qui disposait d’une solide formation dans la peinture. Il deviendra  un pionnier de la photographie et développera des techniques de tirages et de retouches pour obtenir des images de haute qualité.

Charles Nègre, peintre

Charles Nègre introduction

Charles Nègre autoportrait 1863 Musée de Nice

Né à Grasse le 9 mai 1820 dans une famille de confiseurs réputée de la ville, Charles se destine très vite à la peinture et part pour Paris en 1839 où il suit les cours des Beaux-arts. Charles intègre le cours de Paul Delaroche où il rencontre Henri Le Secq et Gustave Le Gray qui deviendront ses amis. Il travaillera aussi dans les ateliers de Michel Martin Drolling et de Jean Auguste Ingres. Ses œuvres sont exposées dans des salons parisiens de 1843 à 1864, il obtiendra quelques récompenses.

Sa peinture est diverse : inspiration mythologique, biblique, historique, nus, portraits, paysages méditerranéens. Son style est figuratif, dans le respect des règles académiques de la composition.

Tout au long de sa vie, Charles pratiquera la peinture et revendiquera son statut de peintre. Beaucoup de ses œuvres picturales sont présentes au Musée d’art et d’histoire de Provence à Grasse (comme Léda et le cygne) d’autres sont visibles au Musée Ingres de Montauban.

Charles Nègre : Léda et le cygne

Léda et le cygne par Charles Nègre

Charles Nègre, photographe

Comme ses amis peintres Henri Le Secq et Gustave Le Gray, Charles Nègre va s’intéresser à la photographie dès sa présentation, en 1839. Il utilisera ce médium, dans un premier temps pour remplacer les esquisses préalables à la peinture. Puis, à partir de 1850, il pratiquera la photographie pour elle-même. En 1851 il est déçu de ne pas avoir été retenu, comme Le Secq et Le Gray pour la mission héliographique. Il décide de parcourir à son initiative, le département des Alpes-Maritimes, et de photographier de littoral du sud-est.

Au début des années 1850, il ouvre un studio à Paris, dans l’Ile Saint-Louis.  L’état français lui passera plusieurs commandes : photographies de la cathédrale de Chartres, œuvres du Louvre, bâtiments de l’asile impérial de Vincennes.  

Plage des planchettes

Porche sud de la cathédrale de Chartres

Charles, perfectionniste

Si au début Charles reprend les procédés déjà utilisés en photographie, il perfectionnera ses techniques. Ayant de solides connaissances en chimie, il préparait lui-même ses papiers et ses compositions pour les tirages. Ainsi, après avoir expérimenté le daguerréotype, il utilisera le calotype, breveté par William Henry Fox-Talbot en 1841. Ce procédé permet des tirages multiples sur papier. D’autre part, Charles peut intervenir sur le négatif et jouer sur les épreuves, laissant libre cours à sa créativité. Les variations dans les dosages de l’hyposulfite de sodium lui permettent de moduler les tonalités de l’image.

Charles Nègre : les ramoneurs

Les ramoneurs 1851 Musée Carnavalet de Paris

Charles Nègre a été l’initiateur de la photographie de rue. Auparavant, compte-tenu des longs temps de pose, les photographes pratiquaient exclusivement en studio pour les portraits. Nègre n’a pas hésité à aller dans la rue. Il présente des scènes de vie de Paris. Certes il n’a pas pris ses clichés sur le vif, les temps de pose restant longs (1 à 2 minutes). Sa célèbre photographie «Les Ramoneurs» est la première de l’histoire qui présente des personnages en mouvement. En fait, il a demandé aux figurants de s’immobiliser pendant la pose. La composition est conforme à la règle des tiers. On remarque le paysage au fond, qui semble « aquarellé ». Cette image qui fige une scène de vie a suscité l’étonnement à cette époque. Elle initie le rôle qui sera plus tard dévolu au médium : saisir l’instantané.

Le stryge 1853 Musée d'Orsay

Le Stryge 1853 Musée d’Orsay

Une autre photographie célèbre de Charles Nègre met en scène son ami Henri Le Secq dans la galerie de la tour nord de Notre-Dame. Il est encadré par deux gargouilles. La composition de cette image est remarquable, verticalité du mur à droite, lignes obliques de la galerie qui conduisent au sujet, netteté des contours, arrière-plan sur Paris.

Charles, l’inventeur

À  partir de 1854, Charles Nègre utilise l’héliogravure pour améliorer la conservation et le rendu de ses tirages. Il va même déposer en 1856, son propre procédé de « damasquinure et gravure héliographique ». Il prend une plaque d’acier, il la revêt d’un vernis sur lequel il imprime l’image par insolation. Ensuite, il passe la plaque dans un bain d’or. Cette méthode permet d’obtenir des nuances allant du noir au blanc les plus intenses en passant par des valeurs respectant les teintes de l’image originale.

Cette technique permet d’obtenir des images d’une pérennité et d’une finesse exceptionnelles, même dans les grands formats. Charles Nègre va dorénavant se spécialiser dans ces reproductions héliographiques. Entre 1856 et 1857, il va réaliser, dans le cadre de sa commande d’état, des planches de la cathédrale de Chartres, de grandes dimensions et d’une qualité graphique exceptionnelle. Il s’agit d’un chef d’œuvre de l’héliogravure.

Retour au pays

Ayant des ennuis de santé, Charles Nègre quitte Paris à la fin de 1861. Il s’installe à Nice où il sera professeur de dessin au Lycée impérial de 1863 à 1878.

Dans un même temps, il va ouvrir un studio de photographie qui connaîtra un certain succès. Il aménage son atelier avec goût : mobilier, tapis, tentures murales de qualité… Il réalise des tirages sur papier salé et albuminé de petit ou moyen format qu’il recolle souvent sur un papier plus épais.

Malgré toutes ces occupations Nègre trouvera du temps pour réaliser des photos de la ville de Nice et de ses environs. Comme pour les portraits, les compositions de ses paysages sont très soignées. Il veut proposer à sa clientèle des documents de qualité, il monte sur les collines environnantes pour prendre des vues plongeantes de la ville. Il photographie également les bâtiments et sites typiques de la ville de Nice. Les personnages qui font la vie de la cité sont également présents sur ses clichés.

Charles Nègre vue de Nice

Vue de Nice depuis la colline Saint Philippe

Le duc de Luynes a dirigé en 1864 une expédition en Palestine, Jordanie, Syrie et Liban. Louis Vignes l’a accompagné pour prendre des photographies. C’est à Charles Nègre  que la reproduction de 64 de ces photographies sur plaques héliogravées a été confiée. Elles seront publiées entre 1871 et 1874.

Djerash photo de Louis Vignes, héliogravure de Charles Nègre

Charles n’a pas abandonné la peinture : il continue cette activité en peignant des paysages à l’huile sur papier. Marseille, Saint Raphaël, Grasse, Nice, Antibes, Menton avec la lumière de Provence … sont ses sujets de prédilection.

En 1878, il quittera Nice pour Grâce où il s’éteindra le 16 janvier 1880.

Bien qu’il se soit toujours considéré comme un peintre Charles Nègre est un grand nom de la photographie.

Le nom du musée de la photographie de Nice.

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

Roger Jourdain

Roger Jourdain revendique son statut de photographe amateur. Pourtant, il a décroché deux fois le titre « Best of the best photographer » décerné par la FIAP en 2016 et 2017. La photographie n’est pas son métier, c’est sa passion. Il l’a vécue dans le monde entier et il nous permet de voyager avec lui, en feuilletant les albums de ses nombreuses photographies. Merci Monsieur Jourdain.

Qui est Roger Jourdain ?

Roger Jourdain est né en 1948 à Vigneux-sur-Seine, en région parisienne. Sa famille s’est installée en Auvergne, alors qu’il était adolescent. Il a fait des études de chimie au Lycée technique de Montluçon.

Parc des volcans
Parc des volcans d’Auvergne

Pour avoir de l’argent de poche, il effectuait des petits travaux chez les agriculteurs voisins. Il consacrait ses petits pécules à sa passion : la photographie. Dès l’âge de 12 ans, il a commencé à prendre des photos : la famille, la nature, les fleurs étaient ses modèles. Puis c’est à 15 ans qu’il a créé son premier laboratoire de développement en utilisant les moyens du bord, en particulier les vieux ustensiles de cuisine de la famille !

La carrière professionnelle de chimiste de Roger Jourdain s’est déroulée entièrement chez Roussel Uclaf (qui deviendra Sanofi). Il a occupé plusieurs postes : chimiste, responsable de la micro-informatique, responsable de l’automatisation. Ses succès dans la photographie lui permettront d’occuper pendant les 5 dernières années de sa carrière le poste de « responsable technique de la Communication ». Et à ce titre : vidéaste – photographe officiel de Sanofi.

La Photographie

Comme nous l’avons vu Roger a toujours été passionné par la photographie. Il a consacré ses premières piécettes à l’achat de ses premiers appareils. Le matériel qu’il utilise aujourd’hui laisse penser qu’il a toujours investi dans le meilleur.

Roger Jourdain, chasseur d'images
Roger Jourdain, chasseur d’images

Roger a toujours étudié la pratique de l’art photographique : adhésion à des clubs photos, participation à de nombreux concours en France. Avec le club photo entreprise de Sanofi (ASRU Cinéphoto Vertolaye),  il a remporté 5 fois la coupe de France en diapositives couleurs et 3 fois la coupe de photographies « Nature ».

Puis il a voulu tenter les concours internationaux. Sans succès au début, il n’a pas baissé les bras. Il a étudié les approches sociologiques, culturelles de l’image dans les différents pays où il concourrait. Roger Jourdain nous dit : « La photographie c’est de l’art. L’art est lié à la culture, et la culture est différente dans chaque pays. Nous devons respecter la culture de chaque pays».

Roger Jourdain, Globe-trotter

Roger Jourdain a parcouru la planète en tous sens, visité 49  pays sur les 5 continents, effectué en particulier 30 safaris en Afrique. Il a ramené de ses voyages de nombreuses photos. Sa photothèque compte plus de 350 000 images et 42 000 diapositives. Je vous propose un bref tour du monde en photos dans le diaporama ci-dessous.

  • Roger Jourdain Spain-Castildeltierra
  • Croatia-Dubrovnik
  • Roger Jourdain Greece-Meteores
  • Roger Jourdain Moulins de Mykonos
  • Russia-Moscow Kremlin
  • Roger Jourdain Tanzanie
  • Désert de Namibie
  • India-Jaisalmer
  • Roger Jourdain Peru-Titicaca lake
  • Peru-Machu Picchu
  • Roger Jourdain Brazil-Iguazu falls
  • Arches National Park, dans l'Utah.
  • Roger Jourdain USA-Monument-Valley

Maintenant, sa notoriété vaut à Roger d’être accueilli dans de nombreux pays (Etats Unis, Chine, Indonésie, Russie, Serbie…) Lors de conférences, il présente son travail, un diaporama de ses réalisations puis une séance de questions-réponses.

L’œuvre de Roger Jourdain

Dans mon article présentant l’exposition chalonnaise «Roger Jourdain, passionnément Nature» on a pu voir un échantillon de photographies de la nature et de la faune sauvage.

Chabrieres-wolves
Chabrieres-wolves

Mais l’œuvre de Roger est très vaste et très diversifiée : portraits, voyages, musique, sports, vieux métiers, bikers, etc.

Je vous encourage à visiter le site « Roger Jourdain, photographe » dans lequel vous découvrirez plus de 12 000 photographies, des vidéos, une interview dans les studios de RCF, des témoignages… Je vous joins également le lien vers la page Facebook de Roger.

Vous voyagerez au Pérou sur la musique des Andes, vous garderez les troupeaux avec les bergers Massaïs, vous danserez avec les loups de Chabrières, vous circulerez sur les routes d’Auvergne en Harley Davidson…

Roger Jourdain Biker-concentration-Crusaders
Biker-concentration-Crusaders

Et si comme moi vous aimez le « BEAU », vous apprécierez surtout la qualité des images, les compositions parfaites, les couleurs vives, les captures de l’instant décisif, les gerbes de gouttelettes d’eau, la galaxie Damascus…

(Du vrai bonheur après toutes ces expositions anxiogènes de photos floues, non cadrées, de sujets sans intérêt qui n’ont que la laideur comme ligne directrice).

L’instant décisif

L’expression « photographe de l’instant décisif » a été employée pour Henri Cartier-Bresson au XXème siècle. Je n’ai pas trouvé de meilleure formule pour qualifier certaines photographies de Roger Jourdain. Je vous propose une sélection d’images qui saisissent cet instant décisif : gerbes d’eau ou de feu, moto volante, trapéziste, cavaliers, danseurs, mouvements suspendus sans jamais de perte de netteté.

  • Eleftheria-Greek-young-woman
  • Mexican-dancers
  • Indonesia-Horseman
  • Sabrina-horsewoman
  • Roger Jourdain Amar circus-trapezist
  • African-Rollier
  • Ecopôle du Forez
  • Aigle-ravisseur-en-chasse
  • Aigle pêcheur
  • Roger Jourdain FMX-Pedro-Moreno
  • Roger Jourdain Zeus damascus

Les récompenses

Roger Jourdain est membre de la Fédération Photographique de France, membre de la Fédération Internationale de l’Art Photographique (FIAP), membre de la Global Photographic Union.

Il collectionne les prix nationaux et internationaux. C’est au total plus de 1900 récompenses qu’il a récoltées dans les concours.

Ce photographe « amateur » a obtenu le titre prestigieux de meilleur photographe du monde en 2016 et en 2017. Ce prix « Best of the best photographer »  lui a été décerné par la Fédération Internationale de l’Art Photographique. Il est le premier français à l’avoir décroché, et le premier européen à l’avoir obtenu deux fois.

Prisca Smile Tanzania
Prisca Smile Tanzania

La FIAP est la seule organisation liée à la photographie reconnue par l’Unesco. Pour obtenir le titre de « Best of the best photographer » en 2016, Roger Jourdain a participé à 232 concours dans 95 pays différents, répartis sur les 5 continents. Il a obtenu 32 fois le titre de meilleur auteur dans ces concours. Je précise que la FIAP demande aux compétiteurs de présenter un maximum de 6 sections de 4 photographies, soit 24 photographies pour chaque concours. La FIAP gère 2 000 000 de photographes dans 95 pays du monde.

Transparence

Je précise qu’à part ses deux portraits, toutes les photographies qui illustrent cet article sont l’œuvre de Roger Jourdain. Elles sont publiées avec son autorisation. Elles restent sa propriété exclusive et ne peuvent en aucun cas être reproduites sans son accord.

Je terminerai par un grand merci à Roger Jourdain pour ces belles images et pour le partage de ses aventures.

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

Ansel Adams

Ansel Adams

(1902 – 1984)

Ansel Adams est né dans une famille aisée de San Francisco. Peu motivé par les études, il commença à photographier la vallée de Yosemite dès l’âge de 14 ans, avec un Brownie d’ Eastman Kodak (appareil en carton, bon marché).

Passionné d’environnement, Adams est réputé pour ses photographies paysagères, en particulier de l’ouest américain. Il a également réalisé des portraits, des natures mortes et des photos documentaires.

Technicien chevronné,  il a expérimenté avec Fred Archer le « zone system ». Cette technique permet de déterminer l’exposition correcte et l’ajustement du contraste sur le tirage final. La bonne répartition de la lumière, la qualité des nuances de gris sont la marque de fabrication d’ Adams et de ceux à qui il a enseigné cette technique.

Ansel Adams - Mirror Lake
Ansel Adams – Mirror Lake

Le groupe f/64

En 1932, Adams et d’autres photographes californiens ( Edward Weston et Imogen Cunningham, en particulier) ont fondé le groupe f/64. Leur projet était de promouvoir leur vision de la photographie. Ils souhaitaient se libérer des modes de l’époque et des contraintes  que les arts graphiques s’imposaient.

Leur vision était une reproduction aussi précise et objective de la réalité, sans manipulation ultérieure (comme les pratiques du pictorialisme). Cette tendance est nommée la « Straight photography » (photographie pure).

Le groupe f/64 a en outre mis en place le département photographie au Museum of Modern Art.

Ansel Adams - Cathedral Peak and Lake
Ansel Adams – Cathedral Peak and Lake

La galerie Ansel Adams

Située au cœur du parc du Yosemite, la galerie présente, outre A.Adams, une vingtaine d’artistes, dont les œuvres sont en rapport avec les paysages et l’âme du parc national et de l’Ouest américain. Plusieurs photographes présentés sont d’anciens assistants d’Adams.

La galerie organise des expositions, des ateliers, des stages de photographie dans le parc. Tentant, n’est-ce pas?

Pour en savoir plus, vous pouvez cliquer sur le bouton ci-dessous :

Galerie Ansel Adams
Galerie Ansel Adams

Dans les cadres suivants, vous pouvez laisser un commentaire, consulter nos publications dans les réseaux sociaux, vous abonner à notre bulletin d’informations. Les boutons carrés, au bas de l’écran sont à votre disposition pour partager cet article dans vos réseaux sociaux.

Vivian Maier

Vivian Maier a vécu une vie anonyme, consacrée aux enfants dont elle avait la charge (elle était nourrice). C’est sa passion qui la rendra célèbre, et l’inscrira au panthéon des plus grandes photographes américaines du XXème siècle. Le destin voudra que des collectionneurs découvrent une œuvre photographique extraordinaire au hasard d’une vente aux enchères. L’auteur de cette œuvre ne sera identifiée que quelques jours après son décès.

Vivian Maier autoportrait
Vivian Maier autoportrait

L’enfance de Vivian Maier

Vivian est née à New York le 1er février 1926. Son père, Charles Maier était américain, d’origine autrichienne, employé dans une droguerie new yorkaise. Sa mère, Maria Joussaud était une française (des Hautes Alpes), immigrée de fraiche date, qui avait obtenue la nationalité américaine par son mariage en 1919. Vivian était la cadette de la famille, son frère, Charles William, étant né en 1920.

Le couple se sépare en 1929. Charles William est confié à la garde de ses grands-parents paternels. Vivian suit sa mère qui trouve refuge dans le Bronx, chez une amie, Jeanne Bertrand, également originaire des Hautes Alpes.

Jeanne était presque quinquagénaire en 1929. Elle était arrivée aux Etats Unis à l’âge de 12 ans. Artiste dans l’âme, elle a d’abord été une photographe réputée, (premières pages de magazines, articles élogieux). Elle a ensuite acquis une renommée comme sculptrice à New York. C’est elle qui a fait découvrir la photographie à Marie et à la petite Vivian.

Jeanne Bertrand
Jeanne Bertrand
Vivian Maier et les enfants du Champsaur
Vivian et les enfants du Champsaur
Vivian-Maier-et-sa-mere
Vivian et sa mère Marie

En 1932 (ou 1933) Marie, Jeanne et Vivian partent pour la France, à Saint Bonnet en Champsaur. Des photographies prises par Marie pendant cette période sont des témoignages de leur séjour. Jusqu’à leur retour aux Etats Unis en 1938, Vivian pourra pratiquer la langue et s’imprégner de ses origines françaises.

Vivian Maier à New York

Vivian Maier à New York
New York – Juin 1954

Dès la fin de son adolescence, Vivian sera employée comme vendeuse puis, elle sera nourrice au domicile de familles aisées.

Elle reviendra dans le Champsaur entre 1950 et 1951 pour vendre une propriété qui lui a été léguée par sa grand-tante. Elle en profitera pour rendre visite aux membres de sa famille, et au cours de longues promenades, elle prendra de nombreuses photographies, quelques soient les conditions atmosphériques

À son retour à New York, elle reprend son activité de nourrice, et avec le premier Rolleiflex, qu’elle achète en 1951, elle continue à photographier le monde qui l’entoure.

Vivian Maier à Chicago

Vivian Maier - Chicago
Chicago 1965

Après quelques mois passés en Californie, Vivian s’installe à Chicago de façon définitive en 1956. Elle entre au service de la famille Gensburg dans laquelle elle s’occupe des trois garçons : John, Lane et Matthew. Elle est bien installée, avec une chambre et une salle de bain privée qui lui sert également de chambre noire. Dès qu’elle le peut, elle part dans la rue photographier la vie quotidienne des habitants, enfants, travailleurs, riches ou pauvres, handicapés, mendiants ou marginaux.

Vivian Maier voyage

vivian Maier dans les Alpes françaises
Alpes françaises

Notre nounou photographe a fait de nombreux voyages sur le continent américain (nord et sud).

Elle prendra un congé, entre 1959 et 1960 pour faire le tour du monde : au départ de Los Angeles, elle se rendra en Thaïlande, en Inde, au Yémen, en Egypte, en Italie, puis en France. Dans les Hautes Alpes, elle parcourra à nouveau routes et chemins à bicyclette en prenant de nombreuses photographies.

Très secrète, Vivian ne dira jamais où elle est allée pendant cette période à la famille Gensburg.

Elle ne reviendra jamais en Europe mais continuera à faire de courts voyages sur le continent américain.

Retour à Chicago

Photographie couleur, cabriolet
Cabriolet Chicago

De retour à Chicago, elle reprendra son service chez les Gensburg jusqu’en 1968. (et oui, les enfants grandissent et n’ont plus besoin de nounou !) Elle restera en contact avec cette famille dans laquelle elle s’est toujours bien sentie. Les trois garçons ont gardé un excellent souvenir de leur nounou qu’ils comparaient à Mary Poppins.

C’est à cette époque que Vivian va passer à la photographie couleur. Elle achète un Kodak et un Leica 35 mm. Elle va dorénavant cesser de développer ses clichés, stockant les négatifs.

Vivian continue simultanément à exercer son métier de nourrice, allant de famille en famille. Elle arrivait dans les maisons avec des quantités impressionnantes de cartons qui contenaient ses archives. Un de ses employeurs en a compté plus de 200 !

Elle ne fréquentait plus sa famille depuis longtemps quand sa mère est décédée en 1975. Son frère l’a suivie en 1977. 

Fin de vie

Vivian finira sa carrière de nourrice en 1993, après quatre ans passés auprès de Chiara Bayleander, adolescente handicapée mentale, dont elle s’occupait avec beaucoup d’humanité.

Evidemment, la situation financière de Vivian était précaire. A la fin des années 1990, les frères Gensburg l’installent dans un appartement confortable à Rogers Park au bord du lac Michigan. Ils seront encore là, lors de son hospitalisation en décembre 2008, à la suite d’une chute. À sa sortie de l’hôpital, ils l’installent dans une maison de convalescence où elle mourra le 21 avril 2009.Ils ne se doutaient certainement pas que c’est la nécrologie qu’ils publieront dans le Chicago Tribune à la suite de son décès qui donnera un nom à l’une des plus grandes photographes du XXème siècle.

Révélation

Quand Vivian Maier est décédée, la révélation de son œuvre avait déjà débutée. En 2007, plus de 150 000 pièces avaient été saisies dans le garde-meuble que Vivian ne pouvait plus payer. Les tirages, les films, les négatifs et les pellicules en partie non développés ont été vendus aux enchères en 3 lots. Un des acquéreurs, John Maloof, eut connaissance, en revendant des tirages sur E bay, de la valeur artistique des photographies. Il a pu racheter une partie des lots des deux autres collectionneurs et commencer un vaste travail de classification, d’investigation, puis de reconnaissance.

Joihn Maloof devant son trésor
John Maloof devant le legs de Vivian Maier

Les autoportraits avaient permis à  John Maloof de donner un visage à la photographe mais il ne connaissait pas son identité. Il avait entrepris le développement et la numérisation des photographies. C’est en 2009, qu’il trouva dans un carton une enveloppe avec un nom et un prénom écrits au crayon « Vivian Maier ». En recherchant sur internet il trouva la nécrologie que les frères Gensburg venaient de publier dans le « Chicago Tribune ».

John Maloof se consacre dorénavant à la reconnaissance posthume de Vivian Maier. Il a retrouvé et interrogé des personnes qui l’avaient connue et il a pu ainsi reconstituer sa biographie.

Reconnaissance

Maloof organise une première exposition au Centre culturel de Chicago « Finding Vivian Maier » L’exposition rencontre un succès immédiat. La vie et l’œuvre de Vivian fascinent aussitôt le monde entier.

Il a publié un premier livre « Vivian Maier : street photographer », en 2011.

John Maloof a coproduit un documentaire en 2013 avec Charlie Siskel également intitulé  « Finding Vivian Maier », en français : « À la recherche de Vivian Maier ». Il relate les conditions de sa découverte et interviewe de nombreuses personnes ayant connu la photographe. Ce film a obtenu en 2015 les oscars du meilleur film documentaire. À partir de cette date, les plus grandes galeries, les plus grands musées organisent des expositions et rétrospectives « Vivian Maier » qui suscitent partout un immense enthousiasme.

Affiche du film « A la recherche de "Vivian Maier »
Affiche du film « À la recherche de Vivian Maier »

L’œuvre de Vivian Maier

C’est sans aucun doute Jeanne Bertrand qui a initié Vivian à la photographie. La qualité de ses clichés donne à penser qu’elle s’est inspirée de Lisette Model. Celle-ci donnait des cours de photographie à New York en 1952, mais il est peu probable que Vivian y ait participé. C’était une autodidacte qui visitait des galeries, consultait des magazines. La réussite de ses clichés tant en exposition qu’en composition en font une photographe de génie.
L’exposition de fin 2021, au Musée du Luxembourg à Paris, est sans doute la plus complète jamais présentée sur Vivian. Organisée par thème, elle est très pédagogique Je détaille ces thèmes dans mon article : Vivian Maier, exposition.

Hommages

Comme nous l’avons vu, dans le monde entier des expositions présentent la nounou photographe depuis la découverte de John Maloof.

Dans les Hautes Alpes l’association « Vivian Maier et le Champsaur » est très active : création de la maison de la photographie, expositions, site et présence dans tous les réseaux sociaux.

Depuis 2020, à Paris une rue du 13ème arrondissement porte le nom de Vivian Maier.

Rue Vivian Maier
Rue de Paris

Bibliographie

Divers auteurs ont publié des ouvrages au sujet de Vivian. Je vous en propose un florilège dans mon prochain article : La bibliographie de Vivian Maier.

Vous pouvez laisser un commentaire dans le cadre ci-dessous, vous abonner à notre bulletin d’informations ou nous suivre sur les réseaux sociaux (liens dans le cadre suivant).

Les boutons carrés (en bas de l’écran) permettent de partager l’article dans les réseaux sociaux.

Henri Cartier-Bresson

Henri Cartier-Bresson

La jeunesse d’Henri Cartier-Bresson

Henri Cartier-Bresson est né à Chanteloup-en-Brie (Seine et Marne), le 22 août 1908.

Il est l’ainé d’une famille de 5 enfants. Fils d’industriel prospère, il reçoit une éducation bourgeoise. Cependant, n’étant pas passionné par les études, il se contentera d’un parcours secondaire au Lycée Fénelon puis au Lycée Condorcet de Paris sans parvenir à décrocher le bac, malgré plusieurs tentatives.

Après s’être intéressé à la littérature (Stendhal, Balzac), Henri se dirigera vers le dessin et la photographie. Ses parents lui offriront son premier appareil photo dès l’âge de 12 ans (un Kodak Brownie). C’est dans un camp scout qu’il fera ses premières prises de vue.

Henri Cartier-Bresson, artiste peintre

A la sortie du Lycée Condorcet, Henri s’oppose à la volonté paternelle : son père souhaite le voir entrer dans l’entreprise familiale. Il préfère se consacrer à la peinture. Ainsi il entre dans le cours d’André Lhote qu’il suivra pendant 18 mois. Il y apprendra les règles de la composition, les proportions, la théorie du nombre d’or… Pourtant, il finira par quitter ce cours qu’il trouve trop théorique.

Pendant cette période, ses rencontres avec les surréalistes : André Breton, Mark Ernst, André Pieyre de Mandiargues influenceront son œuvre.

Henri Cartier-Bresson, photographe

Si Henri Cartier-Bresson se considérait plus comme un peintre, la postérité reconnait en lui un monument de la photographie. Des dizaines d’expositions, des livres et des thèses lui ont été et lui sont encore consacrés. On l’a surnommé «l’œil du siècle», «l’œil absolu» ou le  «photographe de l’instant décisif»

C’est lors d’un voyage en Côte d’Ivoire, en 1930, qu’il prendra ses premières photographies de reportage. Pourtant la révélation lui vint à son retour en France en 1931 en découvrant une photo du Hongrois Martin MunKacsi, publiée dans le magazine « Photographies ». Elle représentait trois jeunes africains courant vers le lac Tanganyika.

 « La seule chose qui a été une surprise complète pour moi et qui m’a amené à la photo est une image de Munkacsi. Quand j’ai vu la photographie des garçons noirs courant vers la vague, je ne pouvais pas croire qu’une telle image puisse être capturée. J’ai pris mon appareil et je suis sorti (…) Soudain, j’ai compris que la photographie pouvait saisir l’éternité, instantanément » Henri Cartier-Bresson, lors d’une interview.

Période surréaliste

Après cet épisode, il va errer dans les rues en saisissant des scènes de vie avec son célèbre Leica, objectif 50 mm. Cet appareil, de taille modeste, permettait de prendre des photos discrètement. Ces images pouvaient être banales  mais le traitement surréaliste appliqué par Henri Cartier-Bresson en fit de véritables œuvres d’art. Le surréalisme consiste à créer en se libérant du contrôle de la raison, par automatisme, en laissant parler l’inconscient. Henri Cartier-Bresson va photographier instantanément, spontanément. C’est à cette période qu’il prendra une de ses photos les plus célèbres : « Derrière la Gare Saint-Lazare ». On voit un homme enjamber une flaque d’eau. Cartier-Bresson a pris cette photo en glissant son appareil à travers une palissade.

derriere-gare-saint-lazarre-paris -henri-cartier-bresson
Derrière la Gare Saint-Lazare 1932

Engagement politique et période de la guerre.

Henri Cartier-Bresson s’engage clairement, dès 1936, auprès des communistes en France et à l’étranger (au Mexique, en particulier). En 1937, il épouse Eli, une danseuse javanaise célèbre, dont le nom de scène est Ratna Mohini. Avec elle, il milite pour l’indépendance de l’Indonésie.

Henri Cartier-Bresson Mexique

Voulant faire abstraction de ses origines bourgeoises, Henri se fera appeler Henri Cartier pendant cette période. Abstraction également du surréalisme pour illustrer les articles du quotidien communiste « Ce soir » avec des photos d’un réalisme dialectique !

Henri Cartier, pendant cette période va s’intéresser au cinéma, qui a un impact plus fort que la photo auprès des militants communistes. Il sera l’assistant de Renoir et participera avec lui au tournage de trois films : « La vie est à nous », « Partie de campagne », et « La règle du jeu ». Il participera en Espagne au tournage de « Victoire de la vie », film documentaire sur les conséquences des bombardements allemands et italiens sur les établissements sanitaires.

Pendant la guerre

Henri Cartier-Bresson est mobilisé dans l’armée française. Fait prisonnier, il réussira à s’évader en 1943, après deux tentatives infructueuses. Il rejoindra alors la résistance à Lyon. À la fin de la  guerre, il réalisera des films documentaires sur la libération de Paris, le village martyr d’Oradour-sur-Glane, et « Le Retour » sur le rapatriement  des prisonniers et des déportés.

Henri Cartier-Bresson continuera à voter communiste jusqu’en 1956, date de l’écrasement de la révolte hongroise par les troupes soviétiques.

Henri Cartier-Bresson Oradour sur Glane
Oradour-sur-Glane

Agence Magnum Photos

1946, les américains sont persuadés qu’Henri Cartier-Bresson n’a pas survécu à la guerre. Ils décident de lui consacrer une exposition posthume « Photographs by Henri Cartier-Bresson » au MoMA de New York. Cartier-Bresson, apprenant la nouvelle se rend aux Etats-Unis pour dire « Coucou, je suis là !» Ravi de savoir qu’une exposition « non posthume » aura quand même lieu, il participe à son organisation, ce qui retardera d’un an sa programmation.

Il retrouve à New York son ami Robert Capa qui lui conseille d’abandonner le surréalisme pour devenir « Photojournaliste ». Dans la foulée, ils fonderont l’agence « Magnum Photos », avec George Rodger, William Vandivert, David Seymour. C’est le magnum de champagne que les fondateurs ont ouvert pour fêter l’évènement qui a inspiré le nom de l’agence. Non, les communistes ne boivent pas que du « gros rouge » , oui, nos amis sont tous communistes!

L’agence sera une coopérative de photographes. Les statuts prévoient que les photographes restent propriétaires de leurs travaux. Ils peuvent gérer leurs négatifs alors qu’auparavant les magazines se les appropriaient. L’agence met en commun ses revenus et redistribue les bénéfices équitablement entre ses membres.

Henri Cartier-Bresson Gandhi

Henri Cartier-Bresson photojournaliste

Une période très riche dans la vie d’Henri Cartier-Bresson commencera avec l’agence Magnum Photos. Il se rendra aux quatre coins du monde. En Inde, il prendra une des dernières photos de Gandhi, la veille de son assassinat. Puis, en Chine, Cartier-Bresson photographiera les derniers moments du parti Kuomintang et les débuts de la République Populaire de Chine. Ensuite, il couvrira l’accès à l’indépendance de l’Indonésie. En 1954, il est le premier photographe admis en URSS. En 1958, il retournera en Chine pour couvrir le dixième anniversaire de la République Populaire. Il aura l’occasion d’apprécier les vertus de la dictature communiste, son travail étant constamment dirigé et surveillé.

Henri Cartier-Bresson Train en Inde

La renommée d’Henri Cartier-Bresson est immense. Comme lui, ses photos font le tour du monde !

Nouveau séjour au Mexique en 1963, puis Cuba, le Japon en 1965, l’Inde à nouveau en 1966. Il retourne également en URSS en 1972.

Vive la France

Henri Cartier-Bresson trouvera le temps de sillonner la France pendant un an. Il publiera un ouvrage « Vive la France » en 1970, accompagné d’ une exposition au Grand Palais.

Les éditions Braun lui commanderont une série de portraits de peintres célèbres : Picasso, Braque, Matisse, Bonnard, Rouault. Il réalise également des photos de célébrités pour des magazines ou des éditeurs (Sartre, Giacometti, Irène et Frédéric Joliot-Curie…)

Scène parisienne
Scène parisienne

Finalement, après avoir parcouru le monde pendant plusieurs décennies, il quittera l’agence Magnum Photos en 1974 pour se consacrer à son premier amour : le dessin. Dans un premier temps, il gardera des responsabilités au sein de l’agence. Puis il finira par s’en éloigner définitivement, regrettant les choix commerciaux des nouvelles générations, loin des idéaux des précurseurs.

La « Master collection »

Henri Cartier-Bresson a rencontré la photographe Martine Franck en 1966. Ils se sont mariés en 1970 et leur fille Mélanie est née en 1972. Henri aspire maintenant à une vie plus calme et sédentaire. Il se convertit au bouddhisme, adopte une philosophie « zen », pratique la méditation.

Henri Cartier-Bresson dessine
Henri Cartier-Bresson par Martine Franck

Pendant cette période il organise en outre l’archivage de ses photographies (environ 20 000 pièces).

Il va en sélectionner 385 pour constituer « La master Collection », (également nommée le « Grand jeu »). En 1973, il fait développer cette collection en 6 exemplaires par Georges Fèvre des laboratoires Picto. Cartier-Bresson retiendra pour ces photos un format de 30 x 40 cm. Il distribuera les collections dans le monde, dans des institutions : la collection Menil à Houston, la Bibliothèque Nationale de France, le Victoria et Albert Museum, l’Université des Arts à Osaka, la Fondation Henri Cartier-Bresson et la dernière depuis peu, la collection Pinault.

La Bibliothèque Nationale de France a demandé en 2021 à 5 commissaires de sélectionner des œuvres dans la « Master Collection » pour organiser l’exposition « Le grand jeu » en 5 volets. Vous pouvez en consulter les détails dans mon article : « Paris expose Henri Cartier-Bresson »

La fondation Henri Cartier-Bresson

Les 20 000 tirages archivés constitueront une base pour la Fondation Henri Cartier-Bresson.

Créée à l’initiative d’Henri C B, de Martine Franck, son épouse et de leur fille Mélanie la fondation a été reconnue d’utilité publique en 2002, avant même son ouverture. Elle montre bien sûr  les œuvres photographiques d’Henri Cartier-Bresson et de Martine Franck mais elle présente en outre des photographes anciens ou contemporains ayant une sensibilité proche de celle des fondateurs.

La fondation s’est d’abord installée dans le quartier Montparnasse. Puis elle a migré rue des Archives dans le quartier du Marais.

A noter que la Fondation HC-B accueille au moment où j’écris cet article une exposition consacrée à Eugène Atget, « Voir Paris »

Fin de vie

Henri Cartier-Bresson s’est éteint le 3 août 2004, à Montjustin dans les Alpes de Haute-Provence. C’est ici qu’il est inhumé. Son épouse repose à ses côtés (Martine Franck est décédée en 2012).

Prix, bibliographie 

Henri Cartier-Bresson a obtenu de nombreux prix tout au long de sa carrière :

  • 1959 : Prix de la Société française de photographie
  • 1967 : Prix culturel de la Société allemande de photographie
  • 1971 : Prix Nadar, pour Vive la France, éditions Laffont-Sélection
  • 1981 : Grand Prix national de la photographie
  • 1982 : Prix international de la Fondation Hasselblad
  • 1986 : Prix Novecento à Palerme
  • 2006 : Prix Nadar, pour Scrapbook, éd. Steidl

Henri Cartier-Bresson a publié de nombreux ouvrages et des auteurs divers, à son sujet. Je vous propose de les découvrir dans mon article : « La bibliographie d’ Henri Cartier-Bresson » qui inaugure notre nouvelle rubrique : Librairie.

Vous pouvez laisser un commentaire dans le cadre ci-dessous, vous abonner à notre bulletin d’informations ou nous suivre sur les réseaux sociaux (liens dans le cadre suivant).

Les boutons carrés (en bas de l’écran) permettent de partager l’article dans les réseaux sociaux.

Eugène Atget

eugene-atget-portrait-1890
Eugène Atget

Eugène Atget est né à Libourne le 12 février 1857, dans une famille d’artisans. Il a été élevé à Bordeaux par ses grands-parents, suite au décès prématuré de ses parents. Après des études secondaires succinctes, il travaille pendant deux ans dans une compagnie maritime, Puis il s’installe à Paris en 1878, où il débute dans un premier temps une carrière théâtrale, sans grand succès. Il n’aura pas plus de réussite par la suite dans le dessin et la peinture.

Cette période lui aura toutefois permis de rencontrer sa compagne : Valentine Delafosse-Compagnon en 1896. lors d’une tournée.

Eugène Atget, photographe

eugene-atget-paris-sacre-coeur
Eugène Atget – Montmartre – Sacré cœur

C’est finalement dans la photographie qu’Eugène Atget fera carrière. Il  commença d’abord par la  constitution d’une collection documentaire à l’intention des peintres (paysages, arbres, plantes). Puis à partir de 1897, il se lança dans une entreprise de photographies de la ville de Paris. Sa clientèle va évoluer : amateurs d’histoire de Paris, bibliothèques, musées. Ces institutions, à cette époque constituaient des fonds photographiques documentaires. Elles lui achèteront des milliers de clichés.

Eugène Atget, documentaliste de Paris.

Eugène Atget a organisé ses photographies en cinq séries. La première, «Paysages documents» est issue de sa collection documentaire pour les peintres (paysages, arbres et plantes…). La deuxième concerne les environs de Paris. La troisième, la plus célèbre, «Paris Pittoresque» comprend 900 photographies. La quatrième série, «Art dans le Vieux Paris» inventorie des portes, des escaliers, des heurtoirs. La dernière série, intitulée «Topographie du Vieux Paris» est réalisée entre 1906 et 1915. Elle répond à une commande de la Bibliothèque historique de la Ville de Paris. Atget photographiera systématiquement chaque arrondissement pour répondre aux besoins des fichiers topographiques. Eugène Atget travaille méthodiquement : il photographie jusqu’à épuisement d’un sujet avant d’en aborder un autre.

Je vous propose ci-dessous un diaporama avec quelques clichés. Le Musée Carnavalet possède un nombre important de ses œuvres. L’exposition « Voir Paris » lui est consacrée à la Fondation Henri Cartier Bresson. Elle vous attend du 3 juin au 19 septembre 2021 (les détails dans notre article : « Eugène Atget : Voir Paris »).

Eugène Atget, photographe méthodique.

Alors que le mouvement photographique de l’époque cherche à imiter la peinture, Atget réalise des clichés nets et détaillés. Il soigne les cadrages l’usage des lignes de fuites  et la répartition de la lumière. Il néglige les appareils modernes, légers et rapides préférant utiliser un appareil en bois, avec une chambre à soufflet, exigeant des poses longues. Eugène Atget réalise lui-même ses tirages et les classe dans des albums qu’il présente à ses clients. Jamais en noir et blanc, la teinte de ses photographies oscille du sépia au brun-violacé.

En 1920, Atget cède les négatifs de 2 621 de ses clichés à l’administration des monuments historiques pour la somme de 10 000 francs. Cette institution acquerra deux mille négatifs supplémentaires après la mort du photographe.

Au début des années 1920,Berenice Abbott et Man Ray achètent des œuvres d’ Eugène Atget. D’autres artistes célèbres feront de même (Georges Braque, Maurice Utrillo, Maurice de Vlaminck, André Derain, André Dunoyer de Segonzac…)

Eugène Atget s’est éteint le 4 août 1927, à Paris.

Postérité.

eugene-atget-photographie-de-berenice-abbott
Eugène Atget, photographié par Berenice Abbott

Bérénice Abbott publiera plusieurs ouvrages pour faire découvrir la documentation qu’Eugène Atget a constituée sur les quartiers anciens de Paris. Elle dira à son sujet : « On se souviendra de lui comme d’un historien de l’urbanisme, d’un véritable romantique, d’un amoureux de Paris, d’un Balzac de la caméra, dont l’œuvre nous permet de tisser une vaste tapisserie de la civilisation française ». C’est grâce à elle que l’œuvre d’Eugène Atget sera reconnue aux Etats Unis avant d’être vraiment reconnue en France.

Du 27 mai au 7 juin 1928, le salon indépendant de la photographie, expose des photographies d’Atget aux côtés de celles de Man Ray, Germaine Krull, Paul Outrebridge, André Kertesz. Après cette présentation, l’œuvre d’Atget devient une référence dans les milieux de l’avant-garde photographique.

Une de ses photos sera choisie par Pierre Mac Orlan pour illustrer son article «la photographie et le fantastique social » dans la revue «Les Annales». De même, quand la revue « L’art Vivant » publie une enquête sur le thème « La photographie est-elle un art ? », c’est une photographie d’Atget qui fait la couverture.

Eugène Atget, vu par le philosophe Walter Benjamin

L’œuvre photographique d’Atget a particulièrement intéressé le philosophe Walter Benjamin. Dans son opuscule «L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductivité technique » , le travail photographique d’Atget fait figure de précurseur dans l’histoire de cette nouvelle discipline. Il écrit :

«Dès que l’homme est absent de la photographie, pour la première fois, la valeur d’exposition l’emporte décidément sur la valeur culturelle. L’exceptionnelle importance des clichés d’Atget qui a fixé les rues désertes de Paris autour de 1900, tient justement à ce qu’il a situé ce processus en son lieu prédestiné. On a dit à juste titre qu’il avait photographié ces rues comme on photographie le lieu d’un crime. Le lieu du crime est aussi désert. Le cliché qu’on en prend a pour but de relever des indices. Chez Atget, les photographies commencent à devenir des pièces à conviction pour le procès de l’Histoire. C’est en cela que réside leur secrète signification politique…»

Hommages

  • Une rue de Paris porte le nom d’Eugène Atget dans le 13éme arrondissement depuis 1978,
  • En 2008, un cratère sur Mars a été baptisé Atget en son honneur.
  • À Libourne, un collège porte son nom

Vous pouvez laisser un commentaire dans le cadre ci-dessous, vous abonner à notre bulletin d’informations ou nous suivre sur les réseaux sociaux (liens dans le cadre suivant).

Les boutons carrés (en bas de l’écran) permettent de partager l’article dans les réseaux sociaux.